EMOR

Publié le par herve souhami

Parachat Emor

Vaykra, le 3ème livre de la Torah est appelé en français le Lévitique. Contrairement à ce que certains imaginent, les noms des 5 livres de la Torah  ne sont ni fantaisistes ni d’inspiration étrangère au Judaïsme. Ce sont les noms transmis par nos Sages,  cités dans les Midrashim les plus anciens. Quand les sages furent contraints de traduire la Torah en grec par l‘empereur ; ils se servirent de ces Midrashim pour donner un titre thématique à chacun des livres de la Torah :

I)                    BERECHIT  : SEFER HABERIAH= LA GENESE

II)                  CHEMOT    : SEFER YETSIAT MITSRAIM= L’EXODE

III)                VAYKRA    : TORAT COHANIM = LE LEVITIQUE

     IV)  BAMIDBAR  : HOUMACH HAPEKOUDIM= LES NOMBRES

V)                DEVARIM  : MICHNEI TORAH= LE DEUTERONOME                       ( répétition de la Loi)

Ces 5 livres (Houmachim) forment donc LE PENTATEUQUE.

C’est donc bien le termes du Midrach qui sont utilisés pour nommer nos 5 livres de la Torah à la petite différence qu’il faut passer par le grec, pour comprendre des mots comme  DEUTERONOME OU PENTATEUQUE. L’histoire du peuple juif et de sa dispersion a rendu souvent nécessaire l’apprentissage des langues étrangères. Ce n’est peut être pas négatif.

Mais pourquoi je vous raconte tout cela ?

C’est à cause de notre Paracha : Emor.

Elle expose en long et en large, les devoirs des Cohanim, les interdictions qui les concernent. La Kedoucha, qui implique à la fois, une manière particulière de vie et à la fois des lois du mariage qui semblent en faire une véritable caste. Le lévitique est lu comme un livre tribal qui organise la supériorité des Leviim et la super-supériorité des Cohanim. Du coup l’intérêt quant à  l’étude de ce passage et même de tout le livre s’en est trouvée diminuée. En étudiant  les parachiot précédentes nous avons essayé de montrer à quel point ce livre méconnu était riche, combien il soulevait des problèmes passionnants. Combien sa portée dépassait de très loin les limites du Beit Hamikdach.

Mais que dire de la parachat Emor ?

Cette paracha enseigne en premier lieu que :

Les Cohanim n’ont pas le droit de toucher, de porter, d’être sous le même toit qu’un mort. Ils ne peuvent participer qu’ à l’enterrement des 7 personnes, dont ils sont naturellement les plus proches, pour lesquels nous avons tous  l’obligation (en cas de décès, lo aleinou) de prendre le deuil :

Pour le père, la mère, le fils, la fille, le frère, la sœur et l’épouse et c’est tout. Et cela, uniquement le au moment de l’enterrement. Pas question pour eux  de pèlerinage sur la tombe de leurs parents, le jour anniversaire de leur décès ou sur celles de grands rabbanim (comme c’est le cas pour le commun des mortels , particulièrement en pleine période de Hilloula).

On apprend dans la même paracha que le Cohen Gadol ne devra ce rendre à l’enterrement de quiconque, jamais, pas même, à celui de ses parents.

Cela renforce l’idée de la caste.

Quand on apprend que les Cohanim n’ont pas le droit d’épouser une femme divorcée, que le Cohen Gadol lui ne peut épouser ni une veuve ni une divorcée notre  impression que ces lois sont tribales, élitistes et surtout désuètes, est de nouveau confirmée.

C’est pire que les H’oukim (les lois pour lesquelles nous n’avons pas d’explication sur le sens de ces lois) car ici nous croyons avoir compris le sens de ces lois mais cette interprétation nous heurte. Nous nous demandons aussi pourquoi faut il étudier cette paracha ?

Quelle leçon doit-elle nous apporter à nous les enfants d’Israël au 21ème siècle, 2000 ans après la destruction du Beit Hamikdach ?

Pour « essayer » d’appréhender l’enjeu de ces textes, une méthode.

L’ interprétation des Mitswot de la Torah (TORAH CHEBEAL PE) repose sur 13 principes. L’un d’entre eux : «  le cas particulier éclaire la règle générale ».

(C’est peut-être le sens du proverbe français que personnellement je n’ai jamais compris : « L’exception confirme la règle ».)

En s’interrogeant sur les situations où une loi particulière est levée, nous découvrons les limites de cette loi, nous appréhendons l’existence de principes supérieurs qui la limite, qui l’encadre :

LE MET MITSWAH

Quand les proches du Cohen Gadol meurent, il n’a pas le droit de participer à l’enterrement, il peut suivre le cortège mais il doit rester loin du cercueil pour ne pas risquer de le toucher !

En revanche, si lors d’un voyage, il repère la présence d’un cadavre et constate qu’il n’y a personne pour l’enterrer,  alors, il a le devoir, l’obligation de le porter de le mettre en terre, c’est un « Met Mitsva ».

Lui, qui n’a jamais été au cimetière, ni pour ses proches ni pour personne parce qu’il a la charge de « grand-prêtre »  va se rendre « Tamé » (impur) pour cette personne qu’il ne connaît même pas.

Nous avions déjà évoqué cette question à propos de la « Tsaraat » , vous vous rappelez ?

Le seul  personnage que la Torah délègue pour accompagner celui qui  a la Tsaraat et qui est donc Tamé d’une Touma très élevée, pratiquement équivalente à celle d’un cadavre, c’est justement le Cohen, le descendant d’Aharon, celui-là même qui ne va pratiquement jamais au cimetière parce qu’il doit garder sa Kedoucha.

Les cohanim n’appartiennent pas à une caste supérieure qui doit se garder de se souiller au contact de classes inférieures de la société et ces deux exceptions nous en fournissent la preuve. Les descendants d’Aharon sont Kedochim parce qu’ils sont chargés de rappeler que les êtres humains ne sont pas des choses, qu’ils sont tous irremplaçables et c’est pourquoi ils ont la Mitsva de bénir le peuple tous les jours.

Aharon, l’ancêtre et le modèle de tous les Cohanim, celui qui nous montre le visage authentique du Cohen n’a pas été choisi  parce qu’il était le plus pieux, le plus savant, etc.

Il a été choisi parce qu’il est capable d’accompagner les autres :

Comme l’affirme Hillel (qui n’était pas Cohen) dans les Pirkey Avot (que nous étudions justement en cette période) :

« Sois parmi les élèves de Aharon qui aime la Paix, qui poursuit la Paix, qui aime les créatures et les rapproche de la Torah. »

Etre tamé , c’est surtout être confronté à une expérience qui installe en nous l’idée que les hommes sont des choses, le contact de la mort nous conduit à penser que nous ne sommes que des corps. C’est une réduction de l’être humain à ce que nous en percevons. Le Cohen n’est pas à part , il conserve sa distance, sa Kedoucha uniquement pour mieux accompagner , pour mieux jouer son rôle de tiers, comme l’indique le nom de la famille à laquelle il appartient : « LEVY », étymologiquement : « celui qui accompagne ».

C’est peut être pour cette même  raison qu’il ne doit pas faire sa vie avec une personne divorcée .Il ne doit pas fonder son couple sur la mort d’un couple.

Le Cohen n’a le droit d’épouser aucune femme divorcée, y compris la sienne.

Si Il a divorcé de sa femme , elle lui est définitivement interdite :

 non pas parce qu’elle a appartenue à un autre homme, comme on le croit  en général, puisque ce n’est pas le cas dans cet exemple. mais parce que :

 le couple en se brisant est mort. Le divorce donne l’impression que les êtres humains sont remplaçables. Cette vision de l’existence ne permet ni d’accompagner le peuple, ni de poursuivre la Paix, ni de bénir les enfants d’Israël.

L’histoire nos apprend que ce sens de la Kedoucha n’a pas toujours été respecté.

La Torah  et les prophètes d’Israël, nous avertit en plusieurs endroits que :

Si les descendants d’Aharon se servent de leurs prérogatives de Cohanim pour fonder ainsi un ordre clérical et devenir des privilégiés ,ils provoqueront à la fois leur perte et la destruction du Beit Hamikdach. 

Hillel, sans descendre de Aharon a incarné ces principes de Kedoucha dans son rôle de Nassi,  de prince du peuple.

Puissions nous, tous introduire ces principes dans notre vie familiale, professionnelle  et collective et ainsi hâter la Délivrance.

 

CHABBAT CHALOM

RAOUL SPIBER

 

 

 

 

Publié dans commentairedelaparacha

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